- Les différents belligérants et la chronologie de leur entrée dans cette première guerre mondiale,
- Les logiques antédiluviennes de quelques généraux et la boucherie humaine qui en a découlé,
- Les spasmes de chaque nation qui ont changé la face du monde,
- Les hommes de la famille qui ont trempé leur godillots
On avait fait le tour
de la question.
Jusqu’à cet article !
Mais que vient faire la Chine en ce début de vingtième siècle ?
En 1914, les soldats
s'enlisent au front et les Alliés manquent de main-d’œuvre. Les gouvernements
alliés et chinois négocient alors dans la plus grande discrétion la venue de
travailleurs en Europe pour effectuer de dangereuses tâches de logistique
militaire.
Les Russes recrutent
200 000 travailleurs.
Les Anglais 100 000
Les Français 40 000,
pour la plupart originaires de la province du Shandong, au nord-est de la
Chine.
Ils ne sont pas tous
recrutés de la même manière.
Les Anglais mettent en
avant les YMCA locales (Young Men Christian Association), dont de nombreux
membres parlent le chinois et des agences privées comme la Huimi.
A la fin de l'année
1916, les autorités anglaises organisèrent le recrutement de
travailleurs chinois dans le Shandong, d'ailleurs sans aucune coordination avec
la mission française du fait de l'incapacité des autorités françaises et
anglaises à parvenir à un accord sur ce sujet.
Le recrutement anglais
fut plus important : plus de 95 000 travailleurs débarquèrent en France après
un très long périple (traversée du Pacifique, du Canada et de l'Atlantique pour
près de 40 000 d'entre eux, passage du Cap de Bonne Espérance pour les autres)
et débarquèrent surtout au Havre et à Calais.
Ils furent employés au
déchargement des navires, aux transports des munitions et matériaux divers dont
l'armée anglaise avait besoin, à la réparation des tanks, à la construction de
voies ferrées et à la réfection des routes ainsi qu'aux travaux de défense
(aménagement de tranchées).
C’est ainsi que l’armée
britannique créera des Labour Corps (unités de travail) composés de civils
volontaires qui compteront en 1918 jusqu’à 100.000 Egyptiens, 21.000 Indiens et
20.000 Sud-Africains sur les deux fronts français et moyen-oriental et le renfort de 100.000 chinois.
Les Français confient
cette tâche en partie à des associations comme le Mouvement Travail-Etudes ou l’Etude Frugale en France.
Une mission commandée par le Lieutenant Colonel Truptil
arriva à cet effet en Chine en janvier 1916, et, après de longues négociations
conclut une convention avec des dignitaires chinois chargés d'opérer ce
recrutement. C'est ainsi qu'arrivèrent à Marseille environ 37 000 travailleurs
chinois provenant essentiellement du Shandong et du Hebei mais également du
Jiangsu et du Guangdong.
Ils furent
principalement affectés aux usines de guerre puis du fait de la pénurie
persistante de main d'œuvre aux principaux ports français pour un millier
d'entre eux ainsi qu'à la zone des armées.
Donc quelques 140 000 Chinois ont ainsi été recrutés dans
leur pays à partir de 1916, ont traversé le globe et sont venus travailler en
France et en Belgique. Placés sous commandements britannique et français, ils
sont arrivés en Europe début 1917, pour les premiers.
Chez les Britanniques, les travailleurs chinois
sont ainsi intégrés dans le « Chinese Labor Corps » et doivent œuvrer
dix heures par jour, 6 ou 7 jours par semaine (les témoignages diffèrent). Le
tout pour un salaire de 1 franc par jour.
Chez les Français,
intégrés à l’armée, leur contrat de travail stipule qu’ils doivent recevoir le
même traitement que les auxiliaires européens. Rien ne dit que cela ait été le
cas. Ils reçoivent entre 1 et 5 francs par jour. A cette occasion, le syndicat CGT fait quelques manifestations pour demander l’égalité de traitement entre
tous les travailleurs et éviter une sorte de « dumping » social.
Ils ont alors travaillé
sur des chantiers ferroviaires, dans des ports, dans des usines d’armement,
mais aussi dans des zones parfois très dangereuses, car proches du front. A la
fin de la guerre, ils participent au nettoyage des zones bouleversées par les
combats et à la reconstruction. Pour ces travailleurs venus de Chine, le
quotidien, c’est aussi la mort.
Plus de 8.000
travailleurs décèdent au total pendant cette période. Beaucoup d'entre eux
meurent sous le feu de l'ennemi alors qu'ils creusent des tranchées et déminent
des terrains. Les autres sont décimés par les épidémies : grippe espagnole,
rougeole, tuberculose.
En 1918, on compte dans
la région Nord-Pas-de-Calais 17 camps qui regroupent jusqu’à 96.000 hommes. Les
principaux camps sont situés à Boulogne-sur-Mer, Wimereux et Etaples où les
Chinois assurent pour les Britanniques le déchargement des navires venant
d’Angleterre. L’armée française les emploiera de la même manière dans les ports
de Calais et de Dunkerque.
Les premiers
travailleurs chinois retournent progressivement chez eux à partir de novembre
1918, en fonction de la disponibilité du transport. Les derniers voyages n'ont
eu lieu qu'en 1920. Parmi les 140 000 travailleurs chinois qui ont fait le
voyage vers l’Europe, nombreux sont ceux qui ne sont pas rentrés au pays.
Il faut savoir qu’à la
fin de la guerre, les Britanniques décident de rapatrier la totalité des
travailleurs chinois, tandis que les Français leur donnent le choix de rester
en France.
En mars 1919, ils sont
encore près de 80.000 à être présents sur le sol français, mais la plupart
repartent vers leurs terres d’origine.
Certains s’installent.
Ainsi, les archives de la Somme font état de plusieurs chinois fondant des
foyers dans ce département. Pour d’autres, environ 3.000, c’est l’implantation
en Région parisienne, dans des villages comme Noisy-le-Grand ou Torcy et bien
entendu le 13ème arrondissement de Paris, qui n’est pas encore nommé «
Chinatown ».
Mais plus de 2500
travailleurs sont certainement morts à la guerre en effectuant leur travail ou
des suites d’une maladie.
Bien sûr, à la fin de
la Première Guerre mondiale, les gouvernements anglais et français s’empressent
de remercier l’Empire chinois pour son aide précieuse. Et ce d’autant que la
Chine a déclaré la guerre au Reich en août 1917. Pour autant, au congrès de Versailles, en 1919, les Alliés acceptent les demandes japonaises de
reconnaître leur annexion des concessions allemandes en Chine !
Plusieurs années après
la fin du conflit mondial, la commission impériale britannique des sépultures
de guerre, CWGC, a fait construire des cimetières en hommage aux soldats et aux
travailleurs morts pendant la guerre. Elle a adopté une résolution selon
laquelle les victimes de guerre doivent reposer sur le sol où elles avaient été
ensevelies, près de l’endroit de leur première bataille. C’est ainsi que des
travailleurs chinois sont enterrés dans des cimetières militaires britanniques
en France et en Belgique ou dans les cimetières communaux français ».
Pour en savoir plus, je vous conseille, entre autre:
exposition virtuelle
Chinese Labor Corps
Source
Chine Aujourd'hui
Souvenir Français
Ecole Jaurès-Curie de Sains-en-Gohelle
les chinois en Europe
et
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Serge Billard-Baltyde